vendredi 22 janvier 2010

Anniversaire de la disparition d'Albert Camus



"L'homme est la seule créature qui refuse d'être ce qu'elle est."


L'Homme Révolté - 1951



Sa vie

Albert Camus est né le 7 Novembre 1913 en Algérie d'un père d'origine alsacienne et d'une mère d'origine espagnole. La famille est de condition modeste. Il est le deuxième enfant du couple: il a un frère, Lucien, plus âgé de 4 ans.
Son père est mobilisé en septembre 1914. Blessé à la bataille de la Marne, il meurt à Saint-Brieuc le 17 octobre 1914. Camus n'a donc pas connu son père. Dès la mobilisation de son mari, Catherine et ses deux enfants vont s'installer chez sa mère à Alger, dans le quartier populaire de Belcourt. Albert et Lucien seront plus éduqués par leur grand-mère, une maîtresse femme, que par leur mère qui abdique toute responsabilité en raison de sa quasi-surdité et d'une difficulté à parler. A l'école, son instituteur, Louis Germain, le pousse à passer le concours des bourses: il pourra ainsi poursuivre ses études au lycée et à l'université. Il lui garde une telle reconnaissance qu'il lui écrira en 1957 lorsqu'il recevra le Prix Nobel de Littérature.

Journaliste, écrivain, passionné de théâtre, il marque la vie culturelle française de 1936 à 1960. Le 4 Janvier 1960, il trouve la mort dans un accident de voiture. L’auteur de "L'étranger" (1942) et de "La peste" (1947) devenait le deuxième plus jeune auteur de l'Histoire à recevoir le Prix Nobel de littérature.

Quelques semaines avant la commémoration du cinquantième anniversaire de sa mort, l’écrivain s'est invité dans le débat public, lorsque le président français, Nicolas Sarkozy, a proposé de transférer ses restes au Panthéon, à Paris. "Ce serait un symbole extraordinaire", se réjouit le chef de l’État au mois de novembre.
Depuis, le projet s'est heurté au refus d’une partie de la famille de l’écrivain. Selon le quotidien français "Le Monde", son fils, Jean Camus, estime que le transfert du corps de son père, qui repose depuis 50 ans à Lourmarin (sud de la France), relève du "contresens" et de la "récupération".


L'étranger et La Peste

L’Étranger et La Peste sont sans doute ses deux romans les plus connus.

L’Étranger est paru en 1942. Il fait partie de « la trilogie de l'Absurde », suite d'œuvres composée d’un roman (L’Étranger), d’un essai (Le Mythe de Sisyphe) et de deux pièces de théâtre (Caligula et Le Malentendu ) décrivant les fondements de la philosophie camusienne : l’absurde. Le roman a été traduit en quarante langues et une adaptation cinématographique a été réalisée par Luchino Visconti en 1967.




Voilà le début du roman qui ébauche l'attitude du personnage principal qui sera la même jusqu'à la fin.



"Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J'ai reçu un télégramme de l'asile: «Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués.» Cela ne veut rien dire. C'était peut-être hier. L'asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres d'Alger. Je prendrai l'autobus à deux heures et j'arriverai dans l'après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir. J'ai demandé deux jours de congé à mon patron et il ne pouvait pas me les refuser avec une excuse pareille. Mais il n'avait pas l'air content. Je lui ai même dit : «Ce n'est pas de ma faute.» II n'a pas répondu. J'ai pensé alors que je n'aurais pas dû lui dire cela. En somme, je n'avais pas à m'excuser. C'était plutôt à lui de me présenter ses condoléances. Mais il le fera sans doute après-demain, quand il me verra en deuil. Pour le moment, c'est un peu comme si maman n'était pas morte. Après l'enterrement, au contraire, ce sera une affaire classée et tout aura revêtu une allure plus officielle. J'ai pris l'autobus à deux heures. II faisait très chaud. J'ai mangé au restaurant, chez Céleste, comme d'habitude. Ils avaient tous beaucoup de peine pour moi et Céleste m'a dit: «On n'a qu'une mère.» Quand je suis parti, ils m'ont accompagné à la porte. J'étais un peu étourdi parce qu'il a fallu que je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire et un brassard. Il a perdu son oncle, il y a quelques mois. J'ai couru pour ne pas manquer le départ. Cette hâte, cette course, c'est à cause de tout cela sans doute, ajouté aux cahots, à l'odeur d'essence, à la réverbération de la route et du ciel, que je me suis assoupi. J'ai dormi pendant presque tout le trajet. Et quand je me suis réveillé, j'étais tassé contre un militaire qui m'a souri et qui m'a demandé si je venais de loin. J'ai dit «oui» pour n'avoir plus à parler".


Si vous voulez écouter ce début du roman lu par Albert Camus, regardez cette vidéo.







Publiée en juin 1947, chez Gallimard, La Peste vaudra à Camus son premier grand succès de librairie (161 000 les deux premières années, plusieurs millions depuis). Ce célèbre roman de Camus se déroule à Oran pendant une épidémie de peste. Sous les yeux du docteur Rieux, le 'mal' sévit et modifie les comportements des habitants de la ville : peur, enfermement, souffrance... Une métaphore de la fragilité de l'homme et une troublante allégorie du fascisme.


Cet extrait se situe au début du roman lorsque le docteur Bernard Rieux, personnage principal du roman, découvre un rat. Neuf jours plus tard, six mille deux cent trente et un rat sont collectés en une seule journée.

"Le matin du 16 avril, le docteur Bernard Rieux sortit de son cabinet et buta sur un rat mort, au milieu du palier. Sur le moment, il écarta la bête sans y prendre garde et descendit l'escalier. Mais, arrivé dans la rue, la pensée lui vint que ce rat n'était pas à sa place et il retourna sur ses pas pour avertir le concierge. Devant la réaction du vieux M. Michel, il sentit mieux ce que sa découverte avait d'insolite. La présence de ce rat mort lui avait paru seulement bizarre tandis que, pour le concierge, elle constituait un scandale. La position de ce dernier était d`ailleurs catégorique: il n'y avait pas de rats dans la maison. Le docteur eut beau l' assurer qu'il y en avait un sur le palier du premier étage, et problablement mort, la conviction de M. Michel restait entière. Il n'y avait pas de rats dans la maison, il fallait donc qu'on eût apporté celui-ci du dehors. Bref, il s'agissait d' une farce. Le soir même, Bernard Rieux, debout dans le couloir de l' immeuble cherchait ses clefs avant de monter chez lui, lorsque vit surgir, du fond obscur du corridor, un gros rat à la démarche incertaine et au pelage mouillé. La bête s'arrêta, sembla chercher un équilibre, prit sa course vers le docteur, s'arrêta encore, tourna sur elle-même avec un petit cri et tomba enfin en rejetant du sang par les babines entrouvertes. Le docteur la contempla un moment et remonta chez lui. Ce n'était pas au rat qu'il pensait".

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